Jour 1 : 25/07/23

Aujourd’hui, c’est le grand départ : au programme, quinze jours de vélo en Irlande. Avec ma mère, on va découvrir le Connemara, longer la côte des falaises de Moher (HP tmtc) puis finir par le terrifiant dénivelé du parc national du Kerry.

Départ à vélo de chez ma grand-mère pour rejoindre la gare de Paimpol. De là, on prend un train pour Guingamp, puis changement de train pour Morlaix. Alors… les rangements pour vélo ne sont pas au top du top. Nos engins sont un peu de travers, dans le passage. Les sacoches à enlever. Les gens avec leurs grosses valises à éviter d’écraser… Mais bon, bien que l’entrée et la sortie du train soient un peu cacophoniques, ça se fait. Heureusement, certains voyageurs se montrent aidants et souriants. Ça fait trop plaisir !

En sortant du train, il nous reste vingt-huit kilomètres de vélo pour rejoindre le port de Roscoff, d’où notre ferry doit partir.

Ça y est. C’est le moment de vraiment commencer à pédaler. Pour un début, le dénivelé n’est pas excessif : il fait environ deux cent quarante mètres mais pour autant, je le sens bien dans mes jambes ! Il faut dire qu’avec les sacoches, le vélo pèse un certain poids et faut le traîner dans les montées !

Pour une fois en Bretagne, on a de la chance, le soleil est avec nous. Le ciel est bleu, immense.

On finit par arriver au port d’où part notre ferry. Il nous suffit de tendre notre passeport, d’accrocher l’étiquette qu’on nous tend sur le vélo, de passer le checking de la douane et on est bon. Trente minutes d’attente au soleil plus tard, on peut embarquer. Nos vélos sont accrochés au fin fond de l’immense garage du bateau avec de vieilles cordes et il est temps de récupérer les sacoches et d’aller découvrir le bateau ! Restaurant… Bars… Boutiques… Cinéma… Salle de jeu. Le ferry est grand et il y a de quoi faire ! On trouve nos places, puis sur les fauteuils face à la mer, tout à l’avant du bateau, les moteurs se mettent en marche. Le bateau tremble. Demain l’aventure commence.

(Plus que douze heures !)

Jour 2 : 26/07/23

Dans Titanic, il y a là où loge Rose et là où loge Jack. Rose est dans les hauteurs du navire. Elle a une cabine confortable avec une jolie vue. Jack lui, il se trouve dans les bas-fonds du navire.

Eh bien de nuit sur le ferry sans cabine, je me sens un peu comme Jack. Il fait froid. Les sièges ne sont pas très confortables. Beaucoup de personnes s’allongent sur le sol en espérant trouver une position plus confortable pour dormir. Et puis, au milieu de la nuit, c’est toute une symphonie de ronflement qui se met en marche. Des ronflements graves, des ronflements aigus. Des alarmes de téléphones. De voiture. Le murmure de quelqu’un qui regarde un film sans écouteurs. Bref, il y en a pour tous les goûts.

Avec le lever du soleil, la terre apparaît rapidement à l’horizon. Les premiers cormorans. Les premiers goélands. Quelques dauphins. Puis un bébé bateau vient guider le gros ferry dans le port.

Une fois amarré, on réussit à sortir rapidement du bateau, escorté par la quinzaine d’autres cyclistes.
Après avoir montré une dernière fois nos passeports, on peut s’élancer sur les routes d’Irlande.

L’objectif, c’est de rejoindre la gare de Cork à une vingtaine de kilomètres et cent dix mètres de dénivelé.
Pour ça, on longe la mer et on suit une longue piste cyclable pour atteindre le centre-ville. Le ciel est bien bien couvert. Il crachine et les grosses gouttes de pluie sont menaçantes.

Une fois à la gare, on a deux heures d’attentes avant de prendre le train. On en profite pour prendre un thé chaud et un sandwich oeuf mayo.

Honnêtement, les trains, c’était un peu ma hantise dans l’organisation de ce voyage. J’avais peur des escaliers à monter et descendre dans les gares. Que ça soit une galère pour trouver de la place dans les trains pour les vélos.

Finalement, rien de tout ça. Que ça soit à Cork, Dublin, ou Galway, on n’a eu aucune marche d’escalier à monter. Les portes des trains pour les vélos étaient à hauteur de quai ou presque. Nos vélos avaient leurs places au fond du train. Bref, une fois qu’ils étaient installés, on est restée tranquille pendant le trajet.
Dehors, le paysage vert défile sous nos yeux.

Il y a de jolies fleurs jaunes dans les champs et sur les talus le long de la voie ferrée.

Un gros chariot recouvert de gobelet en carton passe plusieurs fois dans le wagon. Deux garçons crient « Thé ! Café ». Une douce odeur sucrée emplit l’habitacle.

Après cinq heures de voyage à bord du train, on finit par arriver à Galway.

Il pleut. Il pleut bien, même. Un peu trop.

On roule vers le centre-ville, à la recherche d’un restaurant. Les rues sont blindées mouillées. Entre l’eau et les gens, durs de savoir où donner de la tête. Pour ne rien arranger, le vélo électrique de ma mère fait des siennes. L’assistance ne marche plus… Le voyage commence bien.

Malgré tout, on finit par trouver un restaurant où manger. On cherche un endroit qui ne craint pas trop pour laisser nos vélos. On trimballe les sacoches. Et enfin, on va manger quelque chose de chaud. Une bonne soupe accompagnée de deux énormes tranches de soda bread, le pain local. Puis on enchaîne sur un fish and chips… Mais ça faisait un peu trop finalement… impossible de finir, l’assiette est vraiment trop généreuse.

Après dix dernières minutes sous la pluie, on arrive au Airbnb et on peut enfin souffler.

Jour 3 : 27/07/23

Trajet du jour : Galway – Clonbur. Environ trois heures trente de vélo pour cinquante-huit kilomètres.
Un beau mélange de fine pluie et de soleil.

Sur le trajet, on voit des champs verts fluo et leurs murs de pierre sèche. Des moutons noirs. Blanc. Noir et blanc. Des vaches.

En chemin, on fait un détour pour voir le magnifique monastère de Ross Errilly Friary. Il est vraiment sublime et archi bien conservé avec son cloître et ses hauts murs. Il lui manque juste le plafond. Tout autour, il n’y a que des champs à perte de vue. C’est vraiment un bel endroit.

Ensuite, toujours sur la route, on voit les ruines d’une abbaye dans le joli petit village de Cong. On rejoint ensuite notre Airbnb à peine sept minutes plus loin. C’est une chambre chez l’habitant et dans “les habitants”, il y a un gros chat roux un peu pot de colle et un plus petit tout timide qui fait les gros yeux.

Après une bonne douche et un peu de repos, on va manger dans un des deux restaurants du petit village. J’ai encore pris un fish and chips… Sans surprise, encore une assiette un peu trop copieuse que je n’arrive pas à finir. Je prendrai de la soupe les prochaines fois !

Jour 4 : 28/07/23

Aujourd’hui, on va à Cleggan, un petit village de pêcheur. Pour ça, on a soixante-deux kilomètres et cent vingt mètres de dénivelé positif à faire.

En partant, le ciel a quelques tâches bleues. La première fois que je vois du ciel bleu en Irlande, ça se fête !

Un peu après être partie du Airbnb, on s’est arrêtée à la jonction entre deux lacs pour prendre le petit déjeuner. Il nous restait un scone nature et une sorte de chausson aux pommes à manger.

Après ce petit-déjeuner avec vue plutôt qualitative, on se remet en route tout en se re arrêtant souvent pour prendre des photos. Il faut dire que les paysages sont superbes, tout en reliefs, avec dans les creux, des lacs immenses. Les champs sont d’un vert inimaginable et les moutons qui les parsèment sont vraiment très mignons. Par moment, ça monte. Ça monte sévère même.

Pour avancer, il nous faut braver vent et montée mais la douce récompense des descentes n’en est que plus appréciée. Le plus dur, ça reste d’affronter les rafales de pluie et les gouttes qui s’infiltrent lentement sous ton k-way.

On finit par rejoindre la mer. Par ici, l’océan forme d’immenses fjords qui s’insinuent vers les terres en de larges bandes d’eau sinueuses. C’est beau, grand, mystérieux. On dirait une danse sensuelle entre la terre et la mer. Un mélange d’éléments qui nous dépassent.

C’est près d’un de ces fjords qu’on se prend une averse dévastatrice. Les gouttes sont grosses, la cadence de la pluie, intense. En quelques minutes, l’eau traverse mes vêtements et ruisselle sur ma peau. L’eau pénètre les trous de mon casque pour imbiber mes cheveux. Dévale la peau de mes jambes pour venir gorger de liquide mes chaussettes… Et l’intérieur de mes baskets. Mes pieds deviennent plus lourds sur mes pédales. Mais je continue d’avancer, les yeux plissés tenter de distinguer la route à travers les gouttes qui recouvrent mes lunettes de soleil.

C’est trempé et frigorifié qu’on arrive aux pieds de l’abbaye de Kylemore. Le château est grand, majestueux devant son lac. On mange rapidement du pain et du fromage avant d’aller acheter des tickets pour visiter les lieux. Seize euros pour découvrir que l’intérieur n’a absolument pas le charme de son extérieur. Je trouve le musée très brouillon et peu intéressant. Les pièces n’ont aucun charme. Les infos ne sont pas plus intéressantes que ça. Le point positif, c’est les jardins qui pour le coup sont assez jolis.
Après la visite, il nous reste un peu moins de vingt kilomètres de vélo avant de rejoindre Cleggan. On pédale en évitant de nouvelles intempéries et on finit par rejoindre le joli petit port.

Notre chambre sous les toits est plutôt spacieuse et confortable. J’y trouve un petit radiateur électrique que je branche et mets à fond en espérant faire sécher mes chaussettes et mes baskets pour demain.

Après une douche chaude plus qu’apprécié, on va prendre un chocolat chaud au restaurant du bed and breakfast, et un peu plus tard, on va y manger un fish pie, une spécialité d’ici. Le plat est accompagné d’un saladier de frite gigantesque… Ce qui me permet d’affirmer, après trois jours passés ici, que les Irlandais ont un bon appétit !

Jour 5 : 29/07/23

Je croise les doigts en me réveillant : par pitié, pas de pluie aujourd’hui !

Le petit déjeuner est servi à partir de huit heures et demie. On y va dès l’ouverture et on est les premières arrivées. La patronne nous propose du thé ou du café, nous ramène du pain grillé et nous propose oeuf, saucisse et bacon. Ce qui est sur, c’est qu’on ne va pas mourir de faim.

Mes baskets ont presque entièrement séché. Mes remerciements les plus sincères à ce radiateur qui a sauvé ma journée car il n’y a rien de pire que d’enfiler des baskets mouillées et glacées dès le matin (bon d’accord, il y a pire, mais on va faire comme ci).

Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’aujourd’hui, on prend notre temps. On quitte le bed and breakfast à neuf heures quarante-cinq.

Aujourd’hui, on a soixante-six kilomètres à faire et quatre cents mètres de dénivelé positif. Mais on ne peut pas arriver avant seize heures au Airbnb, alors à quoi bon partir trop tôt ?

On traverse le petit village de Cliffden puis après avoir longé la côte, on arrive sur une petite route perdue dans des landes marécageuses absolument magnifiques. Les herbes hautes sont balayées par le vent. L’eau est omniprésente. Dans les fossés, des petites rivières, des petits lacs. Le sol est gorgé de liquide. Ça sent la tourbe et l’iode.

Le paysage défile à toute vitesse. On monte et on descend, poussées par le vent qui souffle dans notre dos.

Après ces terres sauvages et désertiques, on rejoint à la mer. La côte est superbe. Les criques sont partout, chargées d’algues et de vieilles barques en bois. On trouve des airs de Bretagne à ce paysage maritime.

Ici, les talus sont fournis en ronces recouvertes de mures et fleurs sauvages.

On suit l’eurovélo et on croise plein d’autres cyclo voyageurs.

À moment, on s’arrête dans la lande derrière une petite colline à la recherche d’un endroit abrité du vent pour manger. En dessert, on se fait plaisir avec des cookies au chocolat.

Les derniers kilomètres sont les plus durs. Le vent est face à nous, solide comme un roc. J’ai beau pédaler sur le plat, j’ai l’impression d’être en montée.

Avant d’arriver au Airbnb, on va faire quelques courses. Ce soir, on a une petite cuisine. On prend de la soupe en boite et des pâtes à réchauffer. Pas de fish and chips au programme !

Une fois abrité du vent, la saveur d’une douche chaude prend tout son sens.

Jour 6 : 30/07/23

Le point positif, quand dès le départ tu es sous la pluie, c’est que tu n’as plus à surveiller le ciel : dans tous les cas, tu es déjà mouillé.

C’est comme ça que la journée commence ce matin : sous une pluie fine, mais constante.

On longe la côte irlandaise sur une départementale un peu trop empruntée à mon goût. Entre la pluie qui me fouette le visage et le bruit des voitures, le trajet n’est pas des plus agréable. Aujourd’hui, rien à voir avec la veille : pas de lande désertique battue par les vents, juste cette côte plutôt jolie, mais qu’on ne prend pas le temps d’apprécier à cause de la circulation et de la météo un peu trop irlandaise.

Quelques minutes après être parties, on est déjà trempée. Mes chaussettes sont aussi spongieuses que la tourbe. Mes yeux aussi humides que la vase à marée basse.

Après vingt-deux kilomètres, on s’arrête faire des courses pour le repas de ce soir et le petit déjeuner du lendemain. Pas très original : on prend de la soupe, des pâtes, et histoire de faire une folie, des beignets à la confiture de framboise (les scones natures tout sec, j’ai eu ma dose).

On se remet en route, cette fois pour rejoindre Galway. Pas de chance, pour notre deuxième passage dans cette charmante ville, on est encore frigorifiée et sous des trombes d’eau. Décidément… On apprécie vaguement les petites rues du quartier latin et on se réfugie sous le porche d’un magasin de sport pour manger quelques chips et une tranche de pain avec du fromage.

On se remet très vite en route : sous ce temps, seul l’effort peut nous réchauffer. On enchaîne les vingt-cinq kilomètres restant jusqu’au Airbnb, une tiny house aménagée dans un conteneur. C’est petit, étroit, mais sec et abrité de la pluie et par une journée comme ça, c’est tout ce qu’on demande. Après plus de soixante-dix kilomètres, notre journée à vélo se finit avant quatorze heures trente et une fois ma douche prise, je passe le restant de l’après-midi allongée dans mon lit à dévorer un bon livre.

Jour 7 : 31/07/23

Ballindereen-Lahinch, 68 km, 650 m de dénivelé positif.

Le sol est trempé. Cette nuit et même ce matin, il a encore plu. J’avale ma dernière bouchée de beignet à la confiture. Le réconfort avant l’effort, d’habitude ça ne va pas dans ce sens, mais vu la journée qui se profile, tout est bon à prendre. J’espère qu’on ne sera pas sous la pluie comme la veille, mais la météo n’est pas entre nos mains. On verra bien comment se déroule la journée.

On ferme la tiny house, on salut James, le proprio, et on est parties.

Aujourd’hui, on parcourt presque que des routes de campagne ! Vaches, moutons et chevaux sont nos compagnons de la journée. Cela vaut mieux que les voitures de la veille.

Ce calme est agréable. Il me fait réaliser que depuis deux jours, je ne pense plus aux kilomètres à faire une fois sur mon vélo. Le paysage défile sous mes yeux. J’observe les champs. La mer. Les animaux. Les branches qui dansent avec le vent. Je pense à des histoires que j’ai envie d’écrire. À des personnages. À des choses que j’aime bien.

La nécessité des kilomètres, l’incertitude de la météo, tout disparaît pour laisser place à l’instant présent. Le vent sur mon visage. Son odeur. Je me sens libre, légère.

Mais la réalité des efforts à fournir finit toujours par apparaître au bout d’un moment. Les muscles ont déjà donné dans les montées. Le temps clément laisse place à de violentes bourrasques de vent. Faire du surplace devient fatigant et me donne envie d’arriver. De me reposer.

Mais les falaises de Moher sont là-haut, derrière ces arbres. Il faut encore monter, affronter les éléments. Les cinq derniers kilomètres à parcourir m’en semblent vingt. Je m’accroche. Je serre les dents. Puis enfin, je peux les admirer. Elles sont aussi belles que ce que j’imaginais. Immenses. Sombres. La

mer se déchaîne à leurs pieds. Malgré le froid, j’admire cette merveille de la nature qui me fait face.

Il ne nous reste qu’une dizaine de kilomètres avant de rejoindre notre bed and breakfast. Les rayons de soleil de cette fin de journée sont plus que bienvenu. Le vent dans les descentes me pique les yeux. Je n’ai plus de force dans mes jambes : il est temps d’arriver.

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